« Apprenez à faire vous-mêmes ce que je vends » : la surprenante proposition de valeur de l'entreprise low-tech

À rebours du secret pour conserver la mainmise sur un produit commercialisé, des entreprises qui s'inscrivent dans une démarche low-tech promettent au client-utilisateur une « encapacitation » permettant de dépasser sa dépendance au marché commercial, assurant ainsi un levier de transition intéressant. L'organisation à but lucratif crée ainsi un modèle d'affaires inattendu, qui interroge sur sa viabilité. Le contexte appelle à délimiter un cadre théorique au croisement de notions telles que les communs, l'empowerment, l'économie de la connaissance et le renouvellement de modèles d'affaires orientés vers la transition environnementale, économique et sociale. L'étude comparée de quatre cas entrepreneuriaux liés à la vente de produits manufacturés (SAS, SARL, SAS-SCIC, CAE) permet de comprendre la façon dont chacun met en œuvre la proposition de valeur. Elle permet aussi d'en comprendre les enjeux et les limites. Les résultats montrent qu'au-delà de la communication et des canaux relationnels réinventés, et si des valeurs d'impact positif sont communes à l'ensemble des cas, ces premiers business models low-tech étudiés s'inscrivent dans des proportions très variables dans la transmission des savoirs et savoir-faire, et proposent ainsi une encapacitation à des degrés variés. Les choix innovants de modèles d'affaires opérés conduisent donc in fine à des types distincts d'appropriation des techniques par le client-utilisateur, que nous conceptualisons en « appropriation mineure » et« appropriation majeure ». Ce degré d'appropriation permet de mesurer l'implication de l'entreprise dans la démarche low-tech, pour laquelle la logique d'accompagnement constitue une caractéristique forte du projet entrepreneurial. Les résultats font enfin apparaître des questionnements liés aux pratiques nouvelles de l'entrepreneuriat low-tech, et contribuent à mieux définir leviers et freins d'une « économie low-tech », et à mieux la caractériser. La discussion aborde le rôle des communautés de pratique dans le succès d'un business model low-tech, interroge et tente de préciser les conditions de passage à l'échelle des low-tech.