Les effets du report de l'âge minimal de la retraite à 62 ans : une approche par catégories socio-professionnelles

En utilisant l'enquête emploi, nous analysons par statistiques descriptives la situation des seniors vis-à-vis du marché du travail entre 2010 et 2019 au moment du passage de l'âge minimal de la retraite de 60 à 62 ans, en nous concentrant sur la situation spécifique des seniors « ni en emploi ni en retraite » (NER). Le taux d'emploi avant et après 60 ans a bien augmenté sensiblement du fait de la réforme, mais essentiellement du fait du maintien en emploi des personnes qui prennent leur retraite depuis l'activité. En revanche on n'observe qu'une faible baisse du taux de NER avant 60 ans et une forte hausse de celui-ci au-delà de 60 ans, ce qui signifie que la période « sans emploi ni retraite » s'allonge bien plus qu'elle ne se décale du fait de la réforme. Autrement dit « l'effet horizon » ne joue pas un rôle de premier ordre chez les NER. La situation NER est particulièrement prévalente chez les ouvriers (près d'un ouvrier sur 3 à 59 ans n'est ni en emploi ni en retraite). Elle est également plus fréquente chez les femmes que chez les hommes, davantage protégés par le dispositif « carrière longue ». Par conséquent le décalage de l'âge d'ouverture des droits à retraite a eu des effets très différenciés par profession : alors que la hausse du taux d'emploi après 59 ans est le principal effet de la réforme chez les cadres, le principal effet de la réforme pour les ouvriers est l'allongement de la période ni en emploi ni en retraite (chômage, invalidité, inactivité). Les autres professions sont dans une situation intermédiaire.