Les tensions autour de la construction du sentiment d'être chez-soi en EHPAD : la place de l'identité

Dans un contexte de vieillissement démographique marqué par une augmentation projetée de 49% des 75-85 ans d'ici 2030 (Vie Publique, 2021), la question du lieu de vie des personnes âgées en perte d'autonomie devient capitale (Inspection Générale des Affaires Sociales, 2024). Alors que 90% des français souhaitent vieillir dans leur domicile actuel ou dans un environnement où ils se sentent chez eux en cas de perte d'autonomie (Haut-Commissariat au Plan, 2023), l'offre actuelle ne répond pas à cette demande. Les Établissement d'Hébergement pour Personnes Âgées Dépendantes (EHPAD), qui accueillent près de 600 000 résidents et constituent le dernier lieu de vie pour un quart des français (Drees, 2018, 2022), sont critiqués pour leur standardisation qui compromet l'expression identitaire et l'autonomie des usagers (Zielinski, 2015; Billé, 2016). Ce travail, issu d'un mémoire de Master 2 en Management des Organisations du Secteur Sanitaire et Social (MOSSS), se concentre ici spécifiquement sur la dimension identitaire. Il analyse les tensions inhérentes à ce processus en contexte institutionnel, où la préservation de l'identité peut se heurter aux contraintes organisationnelles des établissements (Cour des Comptes, 2022; Inspection Générale des Affaires Sociales, 2024). En effet, le concept de « chez-soi », dépassant la simple dimension physique, représente une extension de l'identité (Belk, 1988; Zielinski, 2015), reflétant les choix et les habitudes de vie (McCracken, 1986; Fischer, 1997). Il implique l'appropriation, l'attachement et la maîtrise d'un espace (Belk, 1988; Warnier, 1999; Leroux, 2008; Wahl & Oswald, 2010; Larceneux, 2011; Ladwein, 2017), garantissant la continuité et la stabilité du soi (Chauchat, 1999; Kaufmann, 2004; Guiot & Urien, 2012; Bardou & Oubrayrie-Roussel, 2014). Cette recherche vise ainsi à analyser les facteurs influençant l'expérience du chez-soi en EHPAD et explore les mécanismes par lesquels l'identité peut être préservée ou reconstruite dans un contexte institutionnel souvent associé à une rupture ou un déracinement (Mallon, 2007)