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La notion de concurrence peut être étudiée, dans la littérature économique, selon deux conceptions analytiques différentes qui dépendent, plus généralement, de deux méthodes d'appréhension des phénomènes économiques. La concurrence peut tout d'abord être envisagée comme un état du système industriel, comme une caractéristique descriptive de l'industrie à un moment donné du temps. La nature concurrentielle de l'industrie est alors évaluée en fonction du nombre de firmes installées sur le marché, c'est à dire essentiellement par rapport à la structure du marché. Ainsi, lorsque les firmes sont nombreuses sur un même marché, celui-ci sera jugé "concurrentiel"; lorsqu'au contraire un petit nombre de firmes s'y rencontrent, le marché sera dit "concentré". Dès lors que l'on accepte ce cadre d'analyse, deux problèmes majeurs sont à résoudre. Le premier est de définir des indices de mesure de la concentration de plus en plus fins pour être capable de porter un jugement fiable, c'est à dire pour traiter correctement l'information collectée sur la structure du marché. Le second est de déterminer soigneusement les limites du marché: les résultats de l'analyse ne seront évidemment pas les mêmes si l'on mesure le degré de concentration sur un marché restreint ou sur un plus grand marché. La concurrence peut également être envisagée en tant que processus. Ce choix analytique recouvre deux éléments importants, qui sont liés. Le premier est que la concurrence est cette fois un phénomène intrinsèquement temporel, qui évolue dans le temps. Le second est qu'une mesure ponctuelle du degré de concurrence n'a plus véritablement de sens. Ainsi, une pratique jugée anticoncurrentielle à un moment donné du temps peut éventuellement devenir bénéfique socialement par la suite. Cette pratique peut même être parfois le seul moyen de mettre en place une innovation. L'originalité de cette conception est de ne pas refuser systématiquement l'idée d'une compatibilité entre certaines pratiques des firmes, qui peuvent être jugées a priori restrictives de concurrence, et le fonctionnement normal d'un marché concurrentiel. De plus, en n'assimilant pas la concurrence à une situation dans laquelle les acteurs du marché sont isolés et indépendants, ce type d'analyse cherche à étudier dans quelle mesure certaines restrictions de concurrence, comme par exemple les phénomènes de coopération ou d'intégration, sont de fait nécessaires pour faciliter le jeu même du marché. Cette approche en termes de processus est principalement motivée par l'orientation de la réflexion vers une notion de concurrence plus concrète, plus proche du sens commun. Selon les auteurs qui s'inscrivent dans cette approche, le raisonnement en termes de concurrence comme un état conduit à des analyses partielles, qu'il est nécessaire d'étendre afin de disposer d'une véritable compréhension du fonctionnement de la concurrence. Le choix de cette démarche est d'autant plus important que le phénomène de concurrence a évolué dans la réalité depuis quelques années. Les économies modernes sont caractérisées par l'émergence de nouvelles liaisons industrielles et les opérations de rapprochement entre firmes, notamment, apparaissent fondamentales à la réalisation de certains projets. Pour devenir effectifs, les projets d'innovation nécessitent bien souvent la mise en oeuvre d'éléments d'adaptation tout au long de leur développement. Ces éléments d'adaptation semblent être recherchés de manière privilégiée dans l'élaboration de modes d'organisation par les firmes, qu'il s'agisse de pures relations internes ou de relations interfirmes. Ce type de comportement, dont la logique est nécessairement temporelle, s'accommode mal d'une évaluation ponctuelle de la nature de la concurrence. En effet, un raisonnement fondé sur une notion de concurrence comme un état impliquerait d'interdire d'emblée de tels accords et de négliger par là même les effets positifs susceptibles d'apparaître au cours du temps. En conséquence, un nouveau cadre d'analyse s'impose afin d'incorporer les aspects temporels en tant que caractéristiques concrètes de la concurrence.
Suggested Citation
Jackie Krafft, 1996.
"Le processus de concurrence: une proposition de critères d'évaluation,"
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hal-00203663, HAL.
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